En ce lundi midi, je suis encore en train de me remettre de toute l'incroyable énergie absorbée à la fameuse soirée de vendredi soir dernier, qui s'est terminée vers les six heures du matin. En un soir, il y a eu répétition, prestation incroyable, lancement de la troupe, soirée de rave et jam percussif. Un méchant menu qui garantissait à cette soirée une place enviable dans les annales de l'école.
Sitôt arrivé, sitôt on répète
J'arrive à l'école à 17h pile, afin de répéter avec Mélissa et mes collègues le numéro que nous présenterons dans un peu plus de trois heures maintenant. Je n'ai même pas le temps de déposer mes effets et de discuter avec les gens que je suis appelé dans la grande salle pour procéder à l'enregistrement de la répétition, car tout est filmé et photographié. J'avoue qu'en entrant dans la salle qui normalement sert de local de classe, je suis pas mal impressionné par les changements apportés. Gros écran projecteur, spots de lumière, système de son dernier cri...On n'a pas lésiné sur les moyens.
Dès l'arrivée de Mélissa Lavergne, on procède à la mise en scène planifiée lundi dernier, et on y va avec notre numéro de la Pyramide, l'appel de tambour qu'on retrouve dans les partitions de Serge Blanc. Bien installé derrière mon dununba, je me concentre à ne pas manquer une frappe de ma partition. C'est d'autant plus difficile avec le fait qu'on est pressé par le temps, et aussi sachant que l'heure fatidique approche à grands pas. Malgré tout, l'enchaînement de cette pièce avec le soli lent de Mamady Keita se passe très bien, et nous terminons notre répète avec une grande confiance.
L'arrivée des invités
Pendant que les deux autres groupes répètent à leur tour, j'en profite pour aller me chercher à souper et décompresser un peu. Les minutes s'écoulent très vite et bientôt, de plus en plus d'invités attendent et arpentent les couloirs de l'édifice. J'avoue qu'il y en a du beau monde à cette soirée! Et je me fais apostropher à tous les 2 mètres par les élèves de mes deux classes, ce qui sans nul doute contribue à me crinquer davantage. Mais, ma tête est pleine, il y a tellement de tâches de dernière minute à terminer. Placer les instruments, trouver des bâtons adéquats, reviser l'enchaînement des numéros...Par contre, je sais pertinamment bien que tout va bien aller.
Je retourne en bas au premier, où ca grouille de partout. Les élèves de Mélissa, les trois niveaux intermédiaires confondus, sont plongés dans leur partition de rythmes, mémorisant une dernière fois leur accompagnement. Certains sont un peu craintifs et je m'empresse d'aller les rassurer, ce n'est qu'un jeu après tout...Pour ma part, je me dis que je dois seulement plonger et qu'il ne sert à rien de se faire du soucis. Mélissa vient ensuite faire un dernier briefing sur le déroulement du spectacle, puis c'est maintenant l'heure d'entrer dans la grande salle, en file indienne, pour se poster côté jardin de la scène, en attendant le début de la soirée. Beaucoup de murmures à notre arrivée, les gens se tournant à notre passage, et il n'y a plus beaucoup de place de libre sur le plancher.
L'envol
Après de longues minutes où Pierre-Yves s'amuse à enfiler dans le système de son des pièces musicales cubaines, l'atmosphère s'échauffe et unanimement, tous ont très hâte de montrer de quoi ils sont capables. Louis s'amène enfin sur la scène pour souhaiter la bienvenue, et enfin, c'est le moment pour le groupe Intermédiaire 1 de monter sur scène. En discutant avec Mélissa pendant l'attente, je la sens elle-même fébrile à l'idée de montrer pour la première fois l'oeuvre de son enseignement. Mais, je ne suis vraiment pas inquiet pour elle, tellement je sais la capacité sans limite des étudiants dont elle a le mandat de diriger.
Dès l'appel de Mélissa au djembé et les premières notes du djansa, je suis soufflé par l'effet canon que ça donne. Ça sonne comme une tonne de brique, tout le monde est à l'aise, et la foule a un sourire collectif qui semble toujours pendre de l'ampleur. Pour ma part, je ressens une fierté grande comme jamais, constatant de superbe manière tout le chemin parcouru par ces musiciens, et ce, en moins d'un an. C'est pas mal émotif je dirais même. En un clin d'oeil, des souvenirs rejaillissent de leur premier cours dans le temps où j'assistais Catherine, les moments de pur bonheur partagé lors des jams, leur examen de ceinture rythmique...Wow, un beau retour dans le temps!
Je n'ai même pas le temps de me remettre de mes esprits que la prestation prend fin sous les applaudissements nourris de la foule, et c'est au tour de la gang Inter 2 à monter sur scène. Leur numéro est tout aussi relevé, avec le fameux cassé du Méliba, pièce créée par notre percussionniste en chef, avec des solos de chacun des élèves. Quel moment incroyable encore une fois, je n'en reviens tout simplement de voir tout le chemin parcouru par ces élèves, qui voilà quelques mois à peine peinaient à vouloir faire quelques frappes au tambour. Je suis vraiment en train d'assister à quelque chose d'unique et de franchement très très beau.
Suit ensuite les élèves du groupe à Cheick Anta Faye. Ce dernier est gonflé à bloc en montant sur la scène, où il explose avec une salve de frappes que j'ai si souvent entendues sauf que ce soir, elles ont une consonance toute particulière. Quel beau moment de coeur et d'intensité! En interprétant la pièce Samajam Diouf composée par le grand El Hadje Diouf, il y a entre le groupe et la foule un échange qui se crée, on ressent tout de suite la force et la puissance des tambours. Et quand mon ami Truc, vietnamien d'origine, chante le refrain en wolof, c'est génial de constater à quel point le mélange de cultures est omniprésent avec le djembé. Chapeau également aux filles qui, avec Cheick, démontrent que le tambour est tout aussi bien représenté par des femmes que des hommes, contrairement à la tradition.
Après tous ces beaux moments, c'est au tour de notre groupe, les élèves avancés de l'école, à monter sur scène avec Mélissa. Louis nous fait attendre (encore!) en expliquant notre chemin parcouru depuis deux ans maintenant (un an et demi pour ma part), et je ressens une grande fierté d'en être rendu où j'en suis. Surtout d'être en mesure de pouvoir jouer avec Mélissa Lavergne, c'est toujours un honneur que de pouvoir bénéficier de ses judicieux conseils à chaque semaine ! Donc, bien installé derrière mon dununba, je suis fin prêt, et je prends une dernière seconde pour avoir un contact visuel avec chacun de mes collègues qui sont eux aussi tout aussi prêts à jouer. Jamais nous n'avons été aussi prêts d'ailleurs. Le moment de silence, celui tout juste avant de débuter le rythme, est toujours l'instant où une décharge d'adrénaline survient, où on entre dans un état proche de l'euphorie. Et c'est exactement ce que je ressens en ce moment. Et après notre performance, c'est l'hystérie dans la salle, et je suis grisé par tous ces cris et ces sourires.
En l'espace de trente minutes, j'ai été témoin d'un envol sans précédent à l'école. D'un envol qui témoigne qu'en groupe, nous sommes capables d'accomplir de très grandes et très belles choses. Cela laisse présager un futur grandiose pour toute cette belle bande que nous sommes. C'était la première fois que nous présentions le fruit de plusieurs semaines, voire plusieurs mois de travail et de pratique, et franchement, je ne m'attendais pas à ce que ce soit si éloquent. Chapeau à toute l'équipe, ma deuxième famille!