lundi 19 novembre 2007

Le tambour et son cercle

Mardi dernier, j'étais extrêmement fébrile car j'avais (enfin!) la chance de pouvoir donner mon deuxième cours de percussion après l'incroyable expérience de cet été. Le défi qui s'annonçait était plus grand que ce que à quoi j'ai dû composer il y a quelques mois. Cette fois, le mandat était d'enseigner à une trentaine de personnes simultanément. D'emblée, mon plan de match était simple: je voulais partir d'un point de départ, et arriver à la fin du cours en ayant bouclé la boucle, faire en sorte que les élèves repartent de de leur soirée musicale hebdomadaire avec la nouvelle matière dans un état brut, formant un tout cohérent. Je devais me battre contre l'aiguille de l'horloge sans toutefois le faire transparaître, car les étudiants sont d'abord et avant tout présents pour avoir du plaisir et non se sentir pressés par le temps.

J'ai donc pendant toute la journée imaginer, conçu, défait, refait, remanié, ressassé, mélanger, imaginer, retravailler tout le concept du déroulement. Ouf que mon cerveau bouillonnait rendu à la fin de l'après-midi! J'avais décidé de faire confiance à ce que je maîtrise déjà sur le bout des doigts, et j'ai donc opté pour le yankadi comme rythme à enseigner. Ça tombait vraiment bien, puisque la classe n'avait pas encore vu de rythme ternaire, et j'adore l'effet de déstabilisation que les rythmes ternaires amènent dans la pulsion. En quatre-vingts dix minutes, je devais donc montrer un appel et quatre accompagnements rythmiques. Définitivement un beau défi.

Restait seulement une seule corde à mon arc, celle de l'échauffement. Je voulais vraiment intégrer l'échauffement à l'apprentissage, et je devais judicieusement choisir la chose, puisque je ne voulais pas non plus décourager les étudiants avec quelque chose d'un peu trop tordu et cérébral, ce que j'ai parfois tendance à vouloir faire. Je me suis donc inspiré d'un exercice ternaire puisé dans le livre de Serge Blanc, auquel j'ai simplifié quelque peu les enchaînements. À ce moment, j'étais très confiant de mon approche, et ça tombait à pic, puisque c'était l'heure de partir au local.

Rendu là-bas, non sans avoir revisé dans le métro tous les accompagnements rythmiques et le réchauffement, j'arrive à l'école gonflé à bloc, prêt à livrer la marchandise et surtout, m'amuser. Je vois l'enseignement des percussions comme étant d'abord et avant tout la transmission d'une passion et de plaisir, c'est la clé pour arriver à communiquer tout le reste. Revoir cette si belle gang est aussi une belle source de motivation et de réconfort, et tous les ingrédients sont réunis pour que la soirée soit parfaite.

Après m'être assuré que tout est en place, je place mon djembé et je me joins au groupe qui est déjà en train de jouer un kassa bien senti. D'autres étudiants se joignent au cercle, et l'énergie, la chaleur et l'intensité montent en même temps, d'un cran. Ce qui reste de stress est englouti par la joie d'être présent et de pouvoir se payer un bon moment en ce beau mardi soir automnal. Prenant une grande inspiration, je joue un "chauffé" au tambour, le rythme s'accélère, le thermomètre monte de quelques centigrades, et en effectuant l'appel de fin, je me dis: « Ça y est, profite et plonge! »

Jamais je ne me suis senti aussi à l'aise devant un groupe. Je ne compte pas beaucoup d'expérience dans le domaine de l'enseignement de la musique, mais j'ai la chance de disposer d'une confiance absolue de la direction et je crois en mes moyens. Et dès les premiers instants, où, après avoir expliqué les rudiments de mon échauffement, j'entends le groupe jouer pour une première tentative, je suis doublement rassuré. Tout le monde ou presque suit la cadence et avance dans la bonne direction. On peut continuer!

Le reste du cours s'est déroulé dans la bonne humeur et la joie complète. Tous avait le sourire aux lèvres, et ce soir, chaque étudiant a joué selon leur plein potentiel. Ça a donné des moments de musique hors du commun, moments que j'ai savourés avec bonheur. Morceau par morceau, une frappe à la fois, sans lâcher le satané balancement de pieds, je leur ai montré les quatres accompagnements du yankadi. Et, lorsque fut venu le temps de tout mettre ensemble, la magie du rythme a opéré, et j'étais tellement fier de cette gang, de ces élèves, de mes élèves, le temps d'un soir.

Je leur ai offert un beau cadeau à la fin du cours. Je ne pouvais les laisser sans faire monter l'énergie à son paroxysme. J'ai donc opté pour la formule qui m'a tellement secoué et réveillé la première fois que je l'ai expérimenté. La formule du jam improvisé, sans leader, où il faut arriver, en groupe, à construire une pièce musicale en écoutant ce qui se passe et en arrivant à ne pas faire de cacophonie. La symphonie de ce mardi soir restera longtemps gravé dans ma tête. Tout comme les étoiles dans les yeux, les sourires et les mots incroyablement beaux qui m'ont été destinés après le cours.

La boucle a définitivement été bouclée, et le cercle complété. Bien au-deçà de mes attentes! Carpe Diem! 

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