Le djembé africain est sans aucun doute l'instrument le plus accessible au commun des mortels. Personnellement, je ne suis pas un spécialiste du solfège et de la notation musicale. Cela ne m'empêche pas du tout de progresser très rapidement et facilement avec cet instrument. Ce deuxième article de mon guide de la percussion africaine portera donc sur les notions de base concernant les différents sons qui ouvrent toutes grandes les portes du royaume des rythmes africains.
Techniquement parlant, je vous avais introduit la dernière fois les notions primordiales sur la posture à adopter lorsqu'on joue du djembé. Si ce n'est pas déjà fait, retourner lire ces conseils avant de lire ce qui suit, car sans une bonne posture, inutile d'aller plus loin, vous n'obtiendrez jamais de bons sons.
La règle d'or: la pratique
Avant de commencer, ayez toujours en tête ceci. Les frappes au djembé s'apparentent à tout autre apprentissage d'instrument: plus vous allez pratiquer, plus vos sons seront réguliers. Ne soyez pas découragé si vous n'obtenez pas les résultats escomptés dès le début de votre apprentissage. Si vous prenez la peine de jouer régulièrement, sans pression, et surtout en notant au fur et à mesure les points forts et les points faibles de votre jeu, vos sons vont très rapidement devenir clairs et distinctifs.
La basse ou l'instinct du djembé
Instinctivement, quand je donne un tambour à quelqu'un qui n'en a jamais joué, la personne aura toujours tendance à frapper la peau en plein centre, avec le plat de la main. Le son qui en ressort est grave, rond et très résonnant. C'est le son instinctif du tambour: la basse. Le son sert à marquer les temps forts du rythme, le downbeat en anglais, comme le fait la grosse caisse de la batterie dans la musique.
Pour arriver à faire une basse, il faut utiliser la gravité. Toute la force de l'avant-bras est mise à contribution, en positionnant la main paume vers le bas, à plat, doigts collés. La main atterrit en plein centre du tambour. Notion très importante à comprendre ici, c'est l'inertie. Ainsi, et ce peu importe les frappes, il faut toujours laisser rebondir la main après avoir frappé, sinon le son sera complètement étouffé parce que la peau ne vibrera pas. Et vu que les vibrations sont à leur maximum avec la basse, il faut prêter toujours attention à ne pas laisser l'autre main (celle qui ne joue pas) sur la peau. Les mains ne doivent jamais y rester collés plus qu'une fraction de seconde! Imaginez toujours la peau de votre djembé comme un rond de poële brûlant.
Le ton ouvert, la tonique ou le tone
Le deuxième son qui est, si on veut, le complément de la basse est le ton ouvert ou la tonique. C'est un son beaucoup plus mat que la basse, sans résonance. Le ton ouvert ne contient pas d'harmonique aiguë ce qui le distingue de la claque que nous verrons en détail plus loin. Pour arriver à faire une tonique, il faut se servir des phalanges des doigts. La main frappe le bord du tambour, doigts collés, avec une extension complète du bras. Le poignet doit fléchir le moins possible. Les mains sont légèrement pointées vers l'intérieur, suivant le prolongement naturel des bras. Pensez à une forme en "pointe de tarte". Finalement, le pouce de la main forme un angle droit avec l'index afin d'éviter que ce dernier ne frappe la peau. Parlant du pouce, il ne sert jamais à faire des frappes au djembé, et vous risquez des blessures si vous n'y portez pas attention.
La claque, le slap ou la tape
Le troisième son du tambour africain est sans contredit le plus difficile à maîtriser. Il faut persévérer à l'exécuter, surtout pour arriver à régulariser sa sonorité, et ce, tout aussi bien de la main gauche que de la main droite. Votre main forte ou dominante y arrivera naturellement en premier. Avant toute chose, il faut savoir que la claque ne nécessite en aucun cas une force additionnelle pour être entendue clairement. Donc, il ne faut surtout pas forcer le mouvement. Avec les quelques conseils qui suivent, vous serez à même d'en arriver à faire une tape riche en harmoniques aiguës et en régularité.
Avant même de tenter quelque chose, réfléchissez à ce que votre main fait lorsqu'elle donne une claque sur une vraie peau (en espérant que vous allez dorénavant vous concentrer à le faire sur votre instrument, et non sur du vrai monde! ;-)). Ce sont avant tout le bout des doigts qui entrent en contact avec la surface de la peau. Et il y a une légère flexion du poignet à la toute fin du mouvement pour maximiser le fouettement de l'air au contact des doigts. C'est avec ce pattern (flexion du bras, main relaxe, bout des doigts qui fouettent la peau) qu'il faut penser à faire la claque.
Contrairement au ton ouvert, la claque se fait avec les doigts légèrement écartés. C'est également le seul type de frappe où le poignet est mis à contribution. Ainsi, dans le mouvement, le bras initie la flexion, et au moment où la main rencontre le rebord de l'instrument, il faut relâcher le poignet légèrement, pour que la main bascule vers l'arrière une fraction de seconde. Puis, la paume entre en contact avec le rebord (là où la peau rencontre le cordage). Le point d'impact sert de levier ou de pivot qui contribuera à faire fouetter naturellement, sans effort, le bout des doigts sur la peau pour produire un son riche en harmoniques aiguës.
Je vous avertis tout de suite, vous allez avoir de petites "décorations" qui apparaîtront sur vos mains en apprivoisant vos sons. C'est normal et cela va vite s'estomper avec le temps. La corne qui se développe aux points stratégiques d'impact dans la paume des mains garantit une protection supplémentaire et permet d'avoir une meilleure clarté sonore car elle agit comme une couche protectrice. J'y reviendrai d'ailleurs plus en détail dans un prochain billet.
Peau bien tendue, frappes toujours maintenues
Pour conclure, j'aimerais souligner l'importance d'avoir un instrument en bonne condition. Combien de fois aie-je vu des mains "décorées" d'ecchymoses et d'enflures parce que leur instrument n'était pas en bon état? L'élément à examiner avant toute chose est la peau de votre tambour. L'analogie est éloquente lorsqu'on pense au guitariste: avez-vous déjà vu un guitariste jouer avec un instrument désaccordé? Et bien c'est exactement la même chose avec un tambour: la peau doit être bien tendue. Et ce, de façon optimale. Une peau trop relâchée aura tendance à étouffer les toniques aiguës du tambour, alors qu'une peau trop tendue rendra les claques identiques au toniques car la peau n'a pas assez d'espace pour résonner. Il n'y a malheureusement pas de règle d'or universelle. Chaque instrument a ses propres caprices, à vous de trouver une tension idéale qui font que vos sons vont ressortir du fût de votre instrument avec clarté et beauté. Mais n'oubliez pas une chose: le djembé déteste l'humidité. Fuyez tout espace où il fait trop humide, votre peau s'en portera beaucoup mieux!
Je vais enrichir aux cours des prochains jours ce guide sur les sons avec des images et des vidéos. J'avoue que l'apprentissage du djembé est très visuel et aussi, auditif. Je vais donc tenter de rendre le tout plus visuel, mais cela va prendre un peu de temps. En attendant, relisez ces quelques conseils de base et pensez toujours à ces paroles venant du grand maître Mamady Keïta:
L'art de jouer du djembé, c'est d'abord et avant tout l'art de le faire parler, sinon c'est faire du bruit.